Sexisme dans la publicité : exemples et clés de lecture
19 Mars 2024
Introduction au sexisme dans la publicité :
Avant de donner des exemples, de quoi parle-t-on ? Le sexisme dans la publicité se manifeste par la représentation stéréotypée et/ou dégradante des femmes, ancrée dans des notions patriarcales profondément enracinées. La publicité, en tant que puissant vecteur de communication de masse, joue un rôle crucial dans la formation et la perpétuation des normes sociales. Avant tout, les femmes sont souvent cantonnées à des rôles traditionnels et subordonnés. Cette représentation biaisée contribue ainsi à maintenir les inégalités de genre en projetant des images restrictives de ce que signifie être une femme dans notre société.
Les travers de la communication traditionnelle dans la publicité sont donc nombreux. On pense bien sûr à l’hypersexualisation et à l’objectification et la marginalisation des femmes. Les publicités exploitent fréquemment le corps féminin pour attirer l’attention, réduisant les femmes à des objets de désir plutôt qu’à des êtres humains complets avec des identités et des capacités multiples. De plus, la récurrence de ces représentations biaisées conditionne le public à accepter ces images comme normales, voire idéales. Tous ces éléments ont des conséquences, non seulement sur la perception des femmes par les autres, mais aussi sur la perception qu’elles ont d’elles-mêmes. Sans parler de la pression sur les hommes dans ce contexte d’hypersexualisation. Le savoir est une arme, et nous sommes en faveur du changement dans les pratiques publicitaires. Voici donc quelques pratiques identifiables et condamnables, bien qu’il soit difficile d’être exhaustif à ce sujet.
La nudité et son rapport au produit
La nudité dans la publicité est un sujet controversé, qui comporte souvent les même problèmes. Lorsqu’elle est utilisée sans rapport direct avec le produit ou le service promu, la nudité devient souvent un outil de manipulation destiné à attirer l’attention plutôt qu’à informer ou persuader de manière honnête. Dans de nombreux cas, le corps des femmes est exposé de manière suggestive, détournant ainsi l’attention du consommateur du véritable message publicitaire. Cette pratique perpétue l’objectification des femmes et renforce les stéréotypes sexistes, réduisant les femmes à des objets de désir plutôt qu’à des personnes complexes.
Un exemple flagrant de cette pratique est la publicité pour les parfums Tom Ford de 2007, où le flacon de parfum (pour homme) est stratégiquement placé entre les seins d’une femme nue. Cette image utilise donc la nudité de manière gratuite, n’apportant aucune valeur ajoutée au produit lui-même, et renforce l’idée que la séduction et le corps féminin sont des outils de vente à succès. Cette approche contribue alors à ancrer dans l’esprit collectif que la valeur d’une femme réside principalement dans son apparence physique. Cela va sans dire, il ne s’agit pas du seul exemple ! Mais soulignons tout de même que les institutions ne sont pas épargnées, avec parfois des pépites comme celle-ci :
Clichés et stéréotypes véhiculés
Les clichés et stéréotypes sexistes sont omniprésents dans la publicité, souvent utilisés pour simplifier et renforcer des notions traditionnelles des rôles de genre. Ces stéréotypes sont légion : les femmes sont confinées à des rôles domestiques, ne maîtrisent pas les sujets complexes, ne savent pas conduire… Inutile de dire que ces représentations influencent négativement la perception des femmes et renforcent les inégalités de genres ! En insistant sur des rôles unidimensionnels, la publicité contribue à maintenir des stéréotypes ancrés dans la culture populaire, empêchant ainsi une véritable progression vers l’égalité hommes-femmes.
En guise d’exemple, on ne peut s’empêcher de penser à la publicité dévoilée par Renault Belgique en 2014 à l’occasion de la sortie d’une nouvelle Twingo. Le concept est simple : une femme, qui s’exprime d’ailleurs au nom de toutes les femmes, se gare sur un rond point et s’en amuse. Mais ce n’est pas tout ! En guise de justificatif, elle signe un petit mot d’excuse sur… un protège-slip. La grande classe, le tout en un spot publicitaire de 20 secondes immédiatement retiré suite à la polémique engendrée.
Nous retrouvons ce type d’angle narratif chez des marques de tout secteur, pour capter l’attention alors que ce n’est absolument pas nécéssaire. En témoignent les deux exemples ci-dessous de Darty et Numericable.
Position, angle et prise de vue
L’angle de vue et la position des femmes dans les publicités sont souvent utilisés pour valoriser subtilement (ou non) un rapport de force. Dans de nombreuses publicités, les femmes sont placées dans des positions de soumission ou de vulnérabilité par rapport aux hommes. Ces positions sont également accentuées par des angles de vue qui rendent plus petites, ou qui se concentrent sur certaines zones du corps. Par exemple, un angle de vue en plongée, où la caméra est positionnée au-dessus de la femme, peut créer une impression de domination, tandis qu’un angle en contre-plongée, où la caméra est en dessous, peut donner un sentiment de pouvoir et de contrôle.
On reste dans le domaine automobile avec la campagne de Fisker en 2011, qui coche toutes les cases du sexisme précédemment évoqué. En bref : de l’angle de vue à la position, en passant par le message véhiculé (sans mauvais jeu de mot), rien ne va. Entre position submissive et focus sur le corps féminin sans rapport au produit, on se demande comment cette campagne à pu voir le jour.
De même, la campagne Dolce & Gabbana de 2014 ci-dessous est carrément inquiétante. Saisie aux poignets, une femme, jambes dénudées et chaussée d’escarpins, est plaquée au sol par un homme torse nu. Autour, quatre personnages masculins regardent la scène impassibles. Ce visuel a logiquement suscité un vent de protestation en Europe, car il représente de façon humiliante une figure féminine au regard absent, soumise à la volonté d’un homme voire de plusieurs. La campagne a évidemment été retirée suite aux protestations.
Quelles couleurs sont utilisées ?
Les couleurs jouent également un rôle crucial dans la manière dont les publicités ciblent différents genres. Dans les publicités adressées aux femmes, on observe une prédominance de couleurs douces, pastel et surtout du rose. Ces choix de couleur ne sont pas innocents; ils véhiculent des stéréotypes de genre profondément ancrés, associant la féminité à des notions de douceur, de délicatesse et de beauté superficielle. Les nuances de rose et de pastel sont donc utilisées pour vendre des produits allant des articles ménagers aux cosmétiques, en passant par les vêtements et les produits pour enfants. Ce schéma systématique de couleurs renforce ainsi l’idée qu’une femme se doit d’être docile et charmante.
Par exemple, les campagnes publicitaires pour les produits de beauté et les soins personnels utilisent fréquemment des palettes de couleurs pastel pour créer une ambiance de douceur et de féminité. Ces choix visuels peuvent sembler inoffensifs, mais ils renforcent des stéréotypes. Tout ceci limite clairement la perception des rôles et des capacités des femmes en les confinant à des espaces esthétiques.
Ce type de représentations sexistes par les couleurs est omniprésente. On le voit également dans les objets des jeux olympiques 2024 où la mascotte fille nous parle d’amour, presque timide avec ses pieds en dedans, et le modèle garçon nous montre comme il est fort et bien musclé, prêt à bondir.
L’âge et la représentation de la femme
La représentation des femmes mûres dans la publicité est marquée par l’invisibilité ou la stigmatisation. Les femmes de plus de 50 ans sont sous-représentées dans les campagnes publicitaires, malgré leur importance démographique. Lorsque les femmes âgées apparaissent, elles sont souvent confinées à des rôles stéréotypés. Par exemple, celui de la grand-mère ou de la femme ménagère ! Ceci perpétue des clichés réducteurs et limite la diversité des représentations. Cette invisibilité transmet l’idée que les femmes perdent leur valeur en vieillissant.
En revanche, les publicités qui mettent en scène des femmes jeunes exercent une forte pression pour maintenir une apparence juvénile. La « jeunesse éternelle » est glorifiée, ce qui pousse donc les femmes à adopter des régimes de beauté et de soins pour répondre à des standards irréalistes. Cette obsession de la jeunesse peut d’ailleurs avoir des conséquences psychologiques néfastes, comme une faible estime de soi et une insatisfaction corporelle. La pression pour rester jeune et belle est omniprésente, alimentée par des industries qui profitent de ces insécurités pour vendre produits et services.
La campagne de 2021 pour Dove Pro-Age nous offre un bel exemple. Bien que l’intention initiale de la campagne soit de célébrer la beauté à tout âge, elle a été critiquée. Pourquoi ? Car elle continue à utiliser des modèles qui répondent toujours à des normes de beauté étroites et idéalisées. Seules certaines formes de vieillissement semblent acceptables. Résultat : peu de place pour une véritable diversité dans la représentation des femmes âgées.
Et bien d’autres encore…
Le sexisme dans la publicité ne se limite pas aux quelques exemples que nous avons explorés. Les femmes continuent d’être représentées de manière réductrice et stéréotypée à travers diverses pratiques publicitaires. Langage corporel, sentiments dits “féminins”, rôles professionnels… La publicité moderne a donc encore beaucoup de progrès à faire pour atteindre une représentation équitable et respectueuse.
D’ailleurs, le sexisme existe dans l’autre sens, et nous pourrions partager avec vous de nombreuses publicités récentes où c’est l’homme qui est sexualisé, mis sous pression, objectisé…
Il est essentiel de rester vigilant et de critiquer ces représentations pour encourager une publicité inclusive et diversifiée. En fin de compte, il est impératif que l’industrie publicitaire prenne conscience de son influence et de sa responsabilité, car elle agit dans la construction des normes sociales.
Les questions courantes :
Oui, de nombreux pays ont mis en place des réglementations et des codes de conduite pour lutter contre le sexisme dans la publicité. En France, l’ARPP a établi des règles pour éviter les représentations stéréotypées et dégradantes des genres.
Les représentations sexistes peuvent affecter leur estime de soi, mais également leurs aspirations professionnelles et leurs comportements sociaux. De plus, les jeunes filles peuvent se sentir limitées dans leurs ambitions, tandis que les jeunes garçons peuvent développer des attentes irréalistes sur les rôles de genre.
Les entreprises qui utilisent des publicités sexistes peuvent faire face à des réactions négatives de la part des consommateurs, des médias et des organisations de défense des droits. Boycotts, et poursuites judiciaires sont à prévoir !
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